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Vous avez déjà joué à la balle ? On se souvient tous de ce sentiment de plaisir à lancer et à celui de tout faire pour l’attraper. Un jeu, un sport tellement agréable. Mais jouer seul…beaucoup moins plaisant. Tout comme un dialogue à sens unique. 

Dans ce dernier billet d’une série de 4, il sera question de dialogue (quand on lance la balle on souhaite qu’elle nous revienne) et de démocratie ainsi que du facteur temps dans la communication de risque.

NOTE : des extraits de ce billet sont tirés de l’Essai «La perception des politiciens en regard de la communication des risques» G.Maltais 2008. On le dit toujours : le premier client d’une communication de risque ce n’est pas le citoyen, mais bien les décideurs et souvent, ces derniers sont des politiciens. Je voulais comprendre où ils se situaient.

Le dialogue et la démocratie

Bien avant les médias sociaux, outils de communication bidirectionnels et aussi à une époque antérieure des MSGU (qui doivent être intégrés au cœur même des communications de votre plan d’urgence),  nous considérions déjà le dialogue comme un concept primordial à la communication de risque.

Évidemment donc, la communication bidirectionnelle n’a pas été inventée ni avec ni par les médias sociaux. D’autres méthodes et moyens existent afin de solliciter ces échanges et enclencher le dialogue AVEC la population.

Tel que mentionné dans la Partie 1, la communication de risque se définit ainsi :

«Informer, de manière la plus transparente possible, les personnes exposées à un risque. Communication basée sur la perception du risque qu’ont les individus. Le National Research Council la définit comme « un processus interactif d’échange d’information et d’opinion entre les individus, les groupes et les institutions.»

Toutefois, ces «nouveaux médias» devraient en faciliter les interactions et ce, à touts les étapes de sécurité civile, dont en amont d’une urgence, entre autres pour la communication de risque.

Afin de bien mener le processus démocratique, la communication des risques doit favoriser un dialogue entre les différentes patries prenantes. Il y a récurrence de ce thème dans les lectures effectuées. Les premiers auteurs auxquels nous référons sont Smith & Mc Closkey (1998) :

Pour être efficace, le processus de communication doit être dans les deux sens (has to be two-way). Dans toute communication efficace, il doit y avoir un retour d’information (feedback) approprié, ce qui permet  à l’émetteur de peaufiner le message envoyé.  Trop souvent, les organisations ne portent pas suffisamment attention à ce mécanisme de rétroaction. (p.45) Traduction libre.

À la fin de cet article, les auteurs évoquent que la communication est clairement un processus à deux voix impliquant l’échange d’information. De son côté, les mécanismes de dialogues sont définis par l’OMS (2002) comme des éléments principaux de la communication du risque :

« La communication du risque doit aller bien au-delà de la transmission de l’information (…) elle doit favoriser un dialogue public entre les différentes parties prenantes (…) » Cette façon de faire améliorera la communication du risque et permettra d’instaurer une atmosphère de confiance entre tous les partenaires.

Pour (re)voir le concept de la confiance, (re)lisez  la partie 2.

Le BCP, dans son rapport (2000) converge dans le même sens : « les communications relatives aux risques constituent un processus interactif bilatéral ».

Bilatéral signifiant : réciproque, partagé, mutuel.

Antony (2004) reprend ce que d’autres auteurs, comme Slovic, ont déjà mentionné:

«Du point de vue du public, ce qui est aussi crucial dans la communication de risque c’est le processus de «construction de pont» qui encourage un dialogue transparent de toutes les parties prenantes». (Traduction libre)

Pour faire référence à des expériences professionnelles, nous avons procédé à plusieurs reprises à des activités nécessitant le dialogue. D’abord, par la tenue de groupes de discussion lors de phases de préparation et de planification de campagnes d’information sur le risque nucléaire, pour la seule centrale nucléaire, alors en fonction au Québec. Cette étape visait à connaître comment la clientèle cible désirait être jointe, sur quels sujets, etc. À ce sujet, l’ OCDE (2001) a affirmé :

« Il est nécessaire de tester les messages au lieu d’avoir une idée préconçue de ce que le public doit savoir. »

La nécessaire évaluation : étape fondamentale du dialogue

Ensuite, le processus d’évaluation de ces campagnes fait aussi partie du dialogue, par l’entremise de sondages (scientifiques ou pas). Dans les deux cas, ce processus d’échange en est aussi un d’écoute de l’échantillon représentatif de la population et ce, afin de mieux envisager les prochaines communications. On constate donc que le dialogue se situe au cœur de la communication du risque.

Selon Priolo, il est primordial de consulter régulièrement la population afin de savoir ce qu’elle pense et, ainsi, connaître où se situent ses perceptions. Il propose ni plus ni moins qu’une démarche participative et non pas une approche directive de l’information sur le risque.

Astuce : Afin de ne pas omettre cette étape fondamentale, qui vous guidera pour la suite, considérez là dès le début dans vos budgets.

Pourtant, on souhaite trop souvent passer outre cette étape de consultation…mais pourquoi ? Bien que je puisse avoir une idée, je n’ai pas la réponse. Vous l’avez ?

Considérer les capacités du citoyen

En plus d’opter pour un processus d’interaction transparent et démocratique, si les autorités transmettent des responsabilités aux gens,

  • des actions à prendre,
  • des gestes à poser,

ceux-ci seront plus en mesure de contrôler leurs angoisses et leurs craintes. En se responsabilisant, ils deviennent actifs et utiles lors de situations d’urgence[1]. Sandman (2006) l’explique comme étant une des meilleures pratiques avant la crise:

«Les gens peuvent mieux supporter leur crainte s’ils ont des actions à prendre, s’ils croient que ces actions aideront et s’ils se sentent compétents pour les prendre.» (Traduction libre)

Allant dans le même sens, Ropeik (2006) ajoute que l’impression d’avoir un contrôle aidera les citoyens à garder leurs inquiétudes en perspective.

Facteur temps et préparation à l’urgence

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Voyons maintenant l’importance du facteur temps dans le domaine des mesures d’urgence. La communication du risque permet aux citoyens d’avoir le temps de se préparer aux urgences.

En expliquant aux gens, amont, quelles actions concrètes ils pourront poser si l’urgence survient, Smith (2006) consent qu’un changement d’attitude quant à la réponse d’urgence va se produire. Il en fait mention dans un texte concernant les intervenants dans des leçons à tirer suite à la crise du SRAS (ce qu’il propose s’applique parfaitement pour la population). Il ajoute qu’en urgence, le temps offert est très limité pour prendre des actions. De là l’efficacité de procéder avant que ne survienne l’urgence.

Reynolds & Seeger (2005) ont élaboré un modèle, le Crisis Emergency and Risk Communication Model (CERC). Le premier volet de ce modèle constitue la période avant la crise :

  • les messages liés au risque,
  • les avertissements et
  • la préparation.

Il est mentionné que les campagnes de communication et d’éducation ont comme objectif de faciliter la réponse du public à un possible événement. La réalité a rattrapé cette théorie dans les îles de la mer des Caraïbes, où « deux cyclones de même force ont frappé la Guadeloupe : en 1909, où il avait fait 1 200 morts et en 1989, quatre victimes, car les consignes étaient connues de tous. » (Cyprès, 1996).

Allant dans le même sens, suite à l’une des campagnes d’information préventive sur le risque nucléaire, un sondage produit par la firme SOM[2] confirmait que 41 % des répondants se sentaient mieux préparés que cinq ans auparavant à faire face à un accident à la centrale nucléaire de Gentilly – 2. Dans les raisons évoquées :

  • 62 % disaient que c’était parce qu’il y avait plus d’information, de sensibilisation;
  • 23 % dû aux rencontres d’information (organisées par les municipalités et les ministères);
  • 11 % par le DVD d’information (distribué lors de la campagne de 2007).

En fait, ce que nous remarquions à cette époque, c’est que la majorité des raisons faisaient référence à des activités d’information et d’éducation réalisées dans l’une ou l’autre des deux campagnes d’information préventive.

Par contre, bon nombre d’auteurs ne sont pas d’avis que les campagnes d’information sur les risques permettent aux gens de se préparer à faire face à une situation d’urgence. À ce sujet, une des conclusions du Cyprès (2006), dans son document « Information autour des sites à risque », stipule que « les personnes qui reçoivent l’information sont intéressées (culturellement) et pas forcément inquiètes, mais elles ne se préparent pas nécessairement à subir un événement ». Dans les Pays-Bas, les autorités confirment que, même après la catastrophe dans une usine de feux d’artifice, les citoyens ne semblent pas plus portés à se préparer aux urgences, et ce, bien que des cartes présentant des sites à risque et de l’information soient accessibles sur Internet (Meijer, 2005). Cet auteur stipule que le site Internet est visité à 50 % par des citoyens et 50 % par des responsables des mesures d’urgence. Une portion de citoyens s’informe, mais ne semble pas être plus actifs dans leur préparation personnelle.

Du travail d’éducation reste donc à faire.

On constate que, bien que certaines références «datent» de plusieurs années, les concepts n’en sont pas moins à considérer, bien au contraire ! Souhaitons que cette série de billets vous aide à mieux comprendre cette communication spécifique, que vous puissiez mieux l’apprivoiser et la considérer. Questions, commentaires, envie d’échanger sur le sujet ? Cela me fera plaisir !

[1] Il conviendrait d’ajouter que lorsqu’il y a engagement de la part de la population, celle-ci passe du rôle de spectateur à acteur. Référence : Bélanger, Maltais, Nolin, (mai 2008). Conférence au colloque de l’Association des communicateurs municipaux du Québec.

[2] Sondage réalisé pour le compte de l’ex-Agence de la santé et des services sociaux Mauricie Centre-du-Québec, comme activité de rétroaction suite à la campagne d’information préventive nucléaire de 2007.