Dès mes premiers pas en santé publique et en sécurité civile et au fil des ans, j’ai grandi en communication avec et auprès de la communication de risque. Je l’ai côtoyée de près et défendu. Pourtant…Google images

En comparaison

Vous travaillez dans un café et pour le prochain client, vous mettez 3 cuillères à thé de sucre dans SON café SANS lui demander, parce que vous vous aimez votre café ainsi et que vous estimez que lui aussi devrait aimer son café de cette façon.

Si j’ai fais ce vulgaire détour, c’est pour démontrer à quel point, le peu de communication de risque qui se fait, se réalise en méconnaissant le réel client : le citoyen. Cette communication est donc incomprise, peu (mal exploitée) et mal aimée…par ceux qui devraient en fait la pratiquer et la maîtriser.

Par définition

En 2008, je déposais mon Essai de 2e cycle portant entre autres sur la perception de la communication des risques. Je ne reprendrai pas ici, en long et en large le contenu universitaire. Gardons ça simple !  Par définition, la communication de risque s’explique comme ceci :

«Informer, de manière la plus transparente possible, les personnes exposées à un risque. Communication basée sur la perception du risque qu’ont les individus. Le National Research Council la définit comme « un processus interactif d’échange d’information et d’opinion entre les individus, les groupes et les institutions[1]

Puisque la redondance est pédagogique, que faut-il retenir ici ?

  • Perception du risque des individus.
  • Informer de manière la plus transparente possible.
  • Processus d’échange entre les individus, les groupes et les institutions.

Perception et transparence. Deux des concepts incontournables de la communication de risque, abordés et expliqués dans la plupart des formations en communication que je présente.

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La perception est alimentée selon nos croyances, nos valeurs, notre environnement, notre culture, d’où nous venons et qui nous sommes.  L’état des connaissances et les événements qui se passent viennent changer nos perceptions. Donc, vous comprendrez que selon le chapeau que l’on porte (politiciens, ingénieur, médecin, pompier, policier, professeur, citoyen-qui-a-sa-réalité-bien-à-lui, etc.), notre perception du risque diffère. De plus, elle évolue, puisque nous changeons comme individu et que le contexte change également.

Depuis le 11 septembre 2001, nos perceptions quant au risque terroriste ont changé. Et ce, que l’on évolue dans l’un des multiples métiers de l’urgence, que l’on soit journaliste ou simple citoyen. Idem avec les attentats de Paris le 13 novembre 2015. Encore une fois, nos perceptions de ce risque ont été percutées.

Lorsque l’on envisage procéder à une communication de risque (qu’il s’agisse de prévention incendie, de tireur actif, de centrale nucléaire, d’un pipeline à faire passer chez nous, etc.), il s’avère CAPITAL de savoir où se situent les perceptions des citoyens avec qui on prévoit communiquer. Quelles sont leurs peurs ? Pourquoi ? Comment envisagent-ils le dit projet/le dit risque ? Passer outre cette étape c’est l’équivalent que de souhaiter une belle retraite et n’investir aucun $$ en REERS les années précédentes.

La transparence est un concept «galvaudé» sans être utilisé à sa juste valeur. En fait, elle se joue davantage dans l’action que dans la parole. Yvon Deschamps disait «On n’veut pas le savoir on veut le voir !» Quand on communique avec transparence avec une population, on explique par des faits, par des actions ce que l’on fait. Comment on agit et pourquoi. On ne lui dit surtout pas que nous sommes transparents ! Car c’est exactement l’effet contraire que celui désiré qui se produira : les citoyens croiront qu’on leur cache quelque chose.

Pour qu’un risque soit acceptable

Pour le citoyen, un risque sera plus ou moins acceptable selon ce qu’il peut en gagner, en bénéficier.

Un risque évalué, maîtrisé et compris par la population a de fortes chances d’être accepté. À l’inverse, moins nous sommes familiers avec un risque et qu’il nous paraît inutile, moins il nous apparaît comme acceptable.

Dernièrement, j’assistais à une conférence du tout 1er professeur d’université que j’ai eu au Bacc dans le cadre d’un créative morning ayant pour thème le langage. Il est bon de le rappeler :

«Ce que l’humain perçoit comme vrai, l’est ! » 

Si une population n’a pas saisi une information, qu’elle ne comprend pas ce qu’on tente de lui expliquer, il faut donc recommencer ! Autrement. Avec des termes qu’elle comprendra,  d’autres moyens et possiblement, par des personnes différentes.

Beck disait, le risque zéro n’existe pas.

Même s’il s’avère minime, le risque doit être expliqué par la bouche de ceux qui ont la crédibilité pour le faire.  Sans oublier les mesures envisagées pour l’atténuer à la source et les mesures si le risque survient. De même que les actions à poser, en tant que citoyen pour s’en protéger s’il s’avère. Car le citoyen est acteur de sa propre sécurité.

D’autres concepts à considérer

La perception et la transparence ne font pas cavalier seuls dans la communication de risque.

La confiance, l’incertitude, la crédibilité, la permanence, la démocratie, le dialogue, le facteur sont entre autres, des éléments clé à considérer. Nous les traiterons dans un prochain billet.

Vous n’imaginiez pas que communiquer les risques, pouvait être aussi complexe, n’est-ce pas ? Elle nécessite travail d’équipe entre les partenaires concernés, dont le citoyen, du temps et de nombreux efforts, dont celle d’écouter les citoyens. Une réelle écoute ne veut pas dire faire avorter le projet. Elle signifie que l’on doit prendre les citoyens là où ILS sont, dans leurs perceptions. Cela signifie aussi d’envisager devoir modifier le quoi et le comment de la communication prévue à l’origine.

Parce qu’au fond, qui est le client de cette communication ?

 

[1] Brasseur, M. (2001) Repenser la communication interne en situation de risque : prévenir la crise en se basant sur la perception du risque des individus. Université de Montpellier.